Ali Bongo ou le discours à la rhétorique guerrière: « Apprentis sorciers, irresponsables, cassandres en mal d’inspiration… »

Ali Bongo aurait dû ne pas s’attaquer à une partie de ses compatriotes comme il l’a fait il y a quelques jours. Ceux qui ont validé ce discours du Président de la République, la plus haute autorité de l’état, ont commis une faute morale et politique dont les conséquences se feront ressentir au sein des corporations ciblées: les enseignants et les fonctionnaires des régies financières. Le discours de voeux de nouvel an 2022, a finalement pris des accents de règlement de comptes pour certains.

Le Chef de l’Etat a eu des mots extrêmement agressifs vis-à-vis des enseignants grévistes du secteur de l’éducation nationale et des fonctionnaires des régies financières. En s’exprimant comme il l’a fait et en les traitant de tous les noms d’oiseaux, Ali Bongo est sorti de son rôle, qui lui commande une réserve absolue et une hauteur d’esprit dans le langage qu’il utilise. D’autant plus qu’il ne se s’agit d’émeutiers ou de vulgaires voyoux mais de simples fonctionnaires gabonais qui exercent leur droit de grève garanti par nos textes de loi.

Jamais un Chef d’état n’était allé aussi  loin qu’Ali Bongo contre une partie de son peuple quand on considère les mots utilisés pour qualifier les grévistes du secteur de l’éducation et des régies financières et d’autres compatriotes de la sphère politique ou syndicale: les cassandres en mal d’inspiration et à la recherche d’une existence publique…les irresponsables… les apprentis sorciers, bref. Autant d’expressions qui auraient dû être retirées de l’allocution du Chef de l’Etat Ali Bongo Ondimba.

Les analystes politiques comprennent qu’Ali Bongo a été forcé de traduire non pas son état d’esprit mais l’état d’esprit de ceux qui ont écrit son allocution. La voix de la sagesse aurait dû se faire entendre au moment du choix des mots mis dans la bouche du Président de la République. Il ne s’agit pas d’un citoyen ordinaire mais du Président de la République, qui est au dessus de toutes considérations partisanes. On aurait compris si ce discours était sorti de son parti le PDG mais là, pour un discours traditionnellement réservé aux vœux de nouvel an, ce fut une sortie plutôt ratée.

Le « moi président » de François Hollande, ancien président français est tout aussi regrettable pour 2 raisons: il rappelle trop le discours de l’ancien président français à l’époque candidat à la présidentielle et venant d’un autre Chef de l’état, ce choix est étonnant. Deuxio, cette formule tient quand on est un prétendant à la présidence de la République, or Ali Bongo est à la tête du pays depuis 13 ans. Cette formule empruntée à Hollande ne colle donc pas à la situation du président gabonais. 

En cautionnant un tel discours, les tenants du pouvoir ont mis le Président face aux populations et ce n’est pas une bonne idée de faire prendre partie à la plus haute institution dont le rôle devait se résumer à faire des arbitrages pour conserver intacte sa popularité. La dynamique guerrière qui tire les ficelles du pouvoir en place, traduit une certaine fébrilité de la plus haute autorité de l’état. Le Chef de l’état, n’ayons pas peur de le dire, a insulté une partie de son peuple et c’est bien regrettable. Si la réalisation des projets présidentiels est difficile à tenir, le discours d’Ali Bongo au moins, aurait dû être conforme à l’esprit patriotique et de rassemblement qu’il a souvent évoqué. Ce ne fut pas le cas.